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Lors du Colloque à La Gendronnière – 12 et 13 octobre 2019
1/ On peut manger bio, recycler ses déchets, se chauffer à l’énergie solaire et néanmoins exploiter son prochain.
L’humanisme tel que nous l’entendons se fonde sur un changement de société par le changement individuel. Il n’y a là aucun moralisme de circonstance mais bien un réalisme incontournable, car la société telle qu’elle est et telle qu’elle sera est le résultat de la subjectivité humaine. C’est pourquoi l’agroécologie ne peut être dissociée d’une éthique rigoureuse, qui fasse de la modération et de la juste mesure une puissance constructive, une société où la satisfaction des nécessités vitales produise également la satisfaction psychologique, émotionnelle et morale : en répondant efficacement aux impératifs de la vie et de la survie biologique, en respectant et en régénérant le patrimoine nourricier. En étant accessible aux paysans les plus démunis, sans aucun recours aux intrants chimiques issus du pétrole et avec bien d’autres avantages encore, l’agroécologie est aujourd’hui la seule réponse pertinente et rationnelle à la problématique de l’alimentation.
2/ Agroécologie :
Il s’agit bien plus qu’un ensemble de techniques agricoles simples, économes, respectueuses de la biodiversité, accessibles à tous et ayant fait les preuves de leur efficacité dans les conditions les plus difficiles. Sous-tendue par une pensée humaniste, faite de respect, d’équité, de solidarité et de coopération, l’agroécologie conduit à l’autonomie, privilégie l’économie de proximité et n’oublie pas pour autant de laisser une place à la beauté, à la poésie. Elle est une alternative globale pour chaque individu et pour la collectivité, elle est basée sur le respect du vivant : soigner la terre, toute la vie qu’elle recèle et qu’elle porte, y compris nous-mêmes, et prendre soin des relations humaines.
3/ Sobriété heureuse :
Les efforts révolutionnaires des mouvements de protestation comme celui de 1968, ont souvent été réduits à néant (ou à portion congrue) par la confusion de la désinvolture avec la liberté, elle-même assimilée au refus de toute contrainte. Une vision objective et rationnelle est en fait indispensable pour satisfaire aux besoins matériels. Aussi avons-nous géré notre petite ferme comme une petite entreprise, respectant les règles qu’impose une telle gestion. Mais, contrairement à ce qui se passe dans une entreprise ordinaire (pour laquelle extension est synonyme de réussite), nous avons d’emblée opté pour l’autolimitation. C’est cela qui a été notre réussite, car la sobriété est une force. La valeur ajoutée au produit de base s’est construite sur un rapport marchand intégrant le facteur social : rencontres conviviales sur le marché, à la ferme etc. La modération comme principe de vie et la modération comme expérience intérieure constituent l’avers et le revers d’une seule et même quête de sens et de cohérence.
Crédit photo : Mahdi Dastmard on Unsplash