Réaliser la paix de l’esprit

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Par Roland Yuno Rech – Nice, août 2018 (France)

Pendant les premières minutes de zazen, on s’efforce de se concentrer consciemment, en se rappelant à chaque fois les points importants de la pratique : la posture juste, le dos bien vertical, les épaules relâchées, le ventre détendu ; la respiration : on inspire et on expire calmement par le nez, en s’efforçant juste d’aller jusqu’au bout de chaque expiration, et en ne restant pas en rétention de souffle. La respiration doit être fluide, comme l’esprit en zazen, qui ne stagne sur aucune pensée.

Retrouver la paix de l’esprit est un des grands mérites de zazen. Mais cette paix de l’esprit ne se réalise pas en combattant les pensées – même les pensées illusoires, les attachements, les bonno, les émotions.

Certains veulent parvenir rapidement à un état libéré de toute forme d’attachement, d’illusion, et se mettent à combattre ces attachements et ces illusions, de sorte que l’esprit devient un véritable champ de bataille en zazen. Les illusions qui surgissent, l’ego qui veut les éliminer sont les protagonistes de ce combat. Mais ce n’est pas la pratique juste de zazen, c’est-à-dire que ce n’est pas la pratique qui nous libère et qui amène la véritable paix de l’esprit.

En zazen on cesse de vouloir saisir ou rejeter quoi que ce soit ; c’est la pratique de base de zazen. Si on ne se préoccupe pas des pensées qui surgissent, c’est-à-dire si on ne leur prête pas trop d’attention, si on ne les investit pas, elles s’évanouissent d’elles-mêmes. Mais les saisir ou les combattre les renforce.

Même si la paix de l’esprit est un des buts essentiels de zazen, elle se réalise lorsque l’on cesse de vouloir pacifier son esprit, lorsque l’on cesse de vouloir faire quoi que ce soit, lorsque la concentration s’établit naturellement et que l’on se contente d’être simplement assis.

Car l’important en zazen n’est pas le contenu des pensées ou des émotions, des sentiments qui apparaissent, mais bien plutôt le processus par lequel ils apparaissent et passent naturellement si on n’intervient pas. Mais parfois, durant zazen, on est repris par un processus d’attachement aux pensées, on se met à penser consciemment à quelque chose qui nous préoccupe. Alors dans ce cas-là il faut reprendre la concentration consciente, ramener son attention à la posture du corps et à la respiration, inspirer et expirer par le nez pendant plusieurs respirations, jusqu’à ce que l’esprit ait lâché prise d’avec ce qui le préoccupait.

Cet apprentissage du lâcher-prise est un véritable exercice d’assouplissement de l’esprit, qui, lorsque l’on a habitude de la pratiquer, se réalise naturellement, rapidement. Car on n’a plus tendance à stagner sur quoi que ce soit, sur aucun objet mental. Ce qui n’empêche que l’on est conscient de ce qui se passe, mais on ne s’y attache pas. On revient toujours à ce que Maître Deshimaru appelait le point zéro, au-delà de la pensée et de la non-pensée.

Transcription du podcast disponible sur Gyobutsuji