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Teisho de Roland Yuno Rech à Nice en octobre 2020 – France
Bonjour ! Je vais vous parler de la joie dans la pratique du zen. La raison pour laquelle j’ai choisi ce thème, c’est qu’en général on parle trop de la souffrance dans le Bouddhisme, puisque c’est la première Noble Vérité. On a même parfois résumé cette Vérité en disant : « La vie est souffrance ». Or il n’est pas vrai « que la vie est souffrance », mais bien « que la vie comporte de la souffrance ». Et pas seulement de la souffrance, mais ce qu’on appelle « dukkha » dans l’enseignement du Bouddha, que l’on traduit par « souffrance », alors qu’en fait il s’agit « d’insatisfaction ».
Et justement, cet « insatisfaisant » est lié au fait qu’on ne réalise pas notre véritable nature et qu’on n’est pas en harmonie avec ce que nous sommes au fond. Et que par conséquent, on a sans cesse la tentation de désirer, de se procurer ce qu’on croit nous manquer et on est toujours en recherche. C’est pourquoi l’avidité, le désir nous tenaillent constamment, parce qu’on en attend de la satisfaction.
Pour ce qui est de la joie, je pense que la première chose (et moi, je l’ai ressenti tout au début de ma pratique) est qu’il y a une grande joie à découvrir justement la pratique de zazen. C’est-à-dire, même s’il y a de la souffrance dans la vie, il y a un remède à la souffrance. Et ce remède, (pour nous bien sûr), c’est la pratique de la Voie et en particulier de zazen, et son prolongement dans la vie quotidienne. Et quand on en fait l’expérience, c’est une grande joie, parce que justement on se rend compte qu’il y a de l’espoir, pas seulement pour nous, mais aussi pour les autres, en partageant la pratique avec les autres. Donc, je crois que cela est la principale source de joie.
Dans la pratique elle-même, on se contente d’être simplement assis. L’expression « se contenter de » veut dire que « c’est suffisant », et donc la joie que l’on a de pratiquer ne dépend pas d’obtenir quelque chose, mais simplement du fait de pratiquer en lui-même, par le lâcher-prise. Et évidemment, ce « sans vouloir obtenir quelque chose » justement est en soi une grande libération et donc une source de joie infinie.
C’est la raison pour laquelle on peut pratiquer sans tensions. Lorsqu’on est avide, lorsqu’on désire ardemment quelque chose, ça crée des tensions dans le corps et dans la tête, dans l’esprit. Alors qu’en zazen, on dit toujours qu’il faut étirer la colonne vertébrale et la nuque. Parfois on traduit par « tendez bien la colonne vertébrale », mais il ne faut pas tendre, justement. Il faut absolument pratiquer sans tensions, ni dans l’esprit, ni dans le corps.
Dans la vie, on est souvent un peu comme des assoiffés qui sont assis au bord de l’eau, mais qui ne se rendent pas compte qu’il y a de l’eau partout. Ils ne sont même pas assis à côté de l’eau, mais bien au milieu de l’eau. On est au milieu de l’eau, c’est-à-dire au milieu de la nature de Bouddha, on est au milieu d’une vie qui est en unité avec tous les êtres, et donc dans laquelle au fond il ne manque rien. Mais on a toujours l’impression qu’il nous manque quelque chose.