2. L’esprit se purifie
Le deuxième mérite de zazen, c’est l’esprit se purifie.
3. Les illusions se dissipent
A longueur de journée, nous recevons toutes sortes d’influences venant du monde dans lequel nous vivons et nous ne cherchons pas à nous protéger de ces influences. Autrement dit, on ne cherche pas à s’isoler, bien que, quand on fait une sesshin, on évite de la faire dans un endroit agité, on cherche des endroits calmes, pour faciliter la concentration.
« Les illusions qui se dissipent » : mais quelles sont ces illusions ? Maître Deshimaru les avait énumérées comme étant les bonno, les causes de souffrance qui sont au nombre de dix (alors qu’en réalité il y en a beaucoup plus).
Les illusions, les causes de souffrance sont principalement :
- Les désirs en tant qu’avidité
- La colère
- L’ignorance
- L’orgueil
- Le doute
- La croyance dans un égo permanent
- L’attachement à des vues extrêmes
- Les points de vue erronés
- Les croyances hérétiques
- L’attachement à la pratique de ces hérésies.
Ce sont les dix bonno ou dix illusions fondamentales qui sont causes de souffrance.
Pour ce qui est du désir, la vie provient du désir. Sans désir, il n’y a pas de transmission de la vie. Donc, le désir est fondamental. Simplement, on dit que le bouddhisme condamne le désir. Non, on condamne seulement (on critique en tous les cas), le côté avide du désir, qui fait que l’on dépend de l’objet de ses désirs et que pour l’obtenir on est souvent capable de commettre des actions qui ne sont pas très justes. Tout le monde économique est actionné par le désir, et souvent cela fait rentrer les gens dans une compétition, une concurrence et même une certaine forme de violence extrêmement nuisible et source de souffrance.
Le désir fondamental, ce qu’il faut trouver dans la vie, je crois, c’est se demander : « au fond, je suis né, mais qu’est-ce que je désire fondamentalement, qu’est-ce qui peut fondamentalement satisfaire mon existence ? ». Je crois que ça c’est le koan fondamental, la question à se poser pour réaliser une certaine forme d’éveil.
Souvent, c’est de trouver le grand amour, le véritable amour, ça c’est le désir fondamental. Mais à propos de ce désir d’amour, il faut bien comprendre que trop souvent on confond l’amour avec une certaine forme d’avidité, d’esprit de possession, on veut « posséder » l’autre. On veut posséder d’une certaine manière, et en général, cela fait partie des désirs, ce qui est de nature à satisfaire nos désirs et nos besoins.
Nous avons aussi des besoins naturels qu’il faut absolument respecter. Le Bouddha enseignait ce qu’on appelle la Voie du milieu, c’est-à-dire pas de mortifications, pas d’ascétisme excessif, et pas non plus l’inverse. Par exemple, pour ce qui est de la nourriture, il faut avoir une nourriture saine, qui nous donne une bonne énergie pour vivre et pour pratiquer, mais ne pas tomber par exemple dans la boulimie, une gourmandise excessive, ou de l’attachement à une cuisine trop raffinée.
Pour ce qui est de la haine, c’est ce que nous fait haïr (c’est peut-être un mot un peu trop fort), en tout cas c’est ce que nous fait rejeter tout ce qui dérange notre vie, tout ce qui perturbe au fond, tout nous empêche d’obtenir satisfaction dans notre vie. Tout ce qui nous dérange, on le déteste, et souvent la vie est un parcours du combattant entre vouloir obtenir, s’emparer de ce qui nous cause du plaisir, et un combat aussi pour écarter, éliminer, même détruire ce qui nous cause du dérangement ou de la souffrance. On est ballotés entre désir et haine, qu’on appelle « deux poisons ».
Mais il y a aussi un « troisième poison » et il est la cause fondamentale des deux premiers : c’est l’ignorance. C’est-à-dire, au fond, le fait de ne pas se connaître soi-même profondément. Se connaître soi-même profondément, c’est s’éveiller à la véritable nature de notre existence. Ce n’est pas simplement se connaître au sens de « moi, je suis quelqu’un qui est comme ça, qui a tel histoire, tel karma ». Se connaître profondément, c’est comprendre quelle est la véritable dimension profonde de notre existence.
Dans la pratique du zen, ce que nous réalisons c’est – qu’au fond – notre existence n’est pas une existence séparée. La réalité fondamentale de notre existence, c’est notre unité avec tous les êtres, à commencer par notre unité intérieure entre le corps et l’esprit, l’unité avec nos proches, mais aussi l’unité avec tous les êtres, et finalement l’unité avec la nature. Parce que si nous existons, c’est parce que tout l’univers pourvoit à ce que nous permet d’exister : l’air qu’on respire, l’eau qu’on boit, la nourriture qu’on mange, l’aide qu’on reçoit les uns et les autres et qu’on se donne mutuellement dans le travail ou dans l’activité quotidienne.
Nous sommes fondamentalement des êtres destinés à coopérer et à actualiser cette unité, cette vie qui, ultimement, est une vie sans séparation. Être séparé, c’est être mort. C’est en tous les cas, un risque de mort. D’ailleurs, quand on veut punir quelqu’un, on l’enferme dans un cachot et il vit profondément l’angoisse de la séparation totale d’avec tout ce qu’il aime, c’est la prison. Or souvent nous sommes prisonniers de nous-mêmes. C’est-à-dire, si nous sommes trop égocentriques, nous nous privons complètement de cette capacité de communion avec les autres, avec la nature, avec la vie de chaque instant, parce que trop centrés sur nous-même. A ce moment-là, on est centré sur le petit égo, sur nos habitudes mentales.