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Pascal-Olivier Kyosei Reynaud, Narbonne (France), mai 2020
Mystérieux est ce lien d’une conscience à un corps
Être humain, une surprise dans l’immensité phénoménale qui se réalise d’elle-même
Tous les océans sont fleuves, larmes, pluie et chants d’oiseaux
Une fois debout, la moindre pensée prive de la vie, entre deux pensées un Bouddha sourit
Mais…
Je ne suis pas ce corps, qu’il marche, parle, dorme ou mange
Je ne suis pas cette pensée, ni cette parole, ni ce silence
Je ne suis pas ces croyances, ces attachements, cette volonté
Au commencement, rien n’apparaît, à la fin rien ne disparaît
Le commencement et la fin n’existent pas, l’ici et maintenant non-plus
Pourtant chaque goutte réfléchit la lueur de la lune qui elle-même reflète celle du soleil
Également ces yeux sont gouttes liquide, ce cœur présence reflétante
Frères et sœurs humains, pourquoi s’infliger autant de souffrances ?
Refusant le trésor de l’ainsi, nos mains et nos regards s’habillent de rêves. Croyant parler, nous énumérons nos peurs et avançons à tâtons
L’ainsi, l’être éveillé le voit distinctement, sans rien faire pour cela
Le ciel infini, libre et changeant
Le chant de chaque oiseau et le parfum de chaque fleur
Le vent qui caresse et l’eau qui remonte à sa source, l’immobile ou celle qui coule vers l’océan
Cet arbre enraciné et sa sève bourgeonnante
Chaque enfant qui pleure, l’animal abandonné ou tué
La main tendue ou le poing levé, chaque haine, chaque amour me sont connus
Être sans être, une écorce de vie
La parole du silence qui, si elle se prend au jeu, devient silence de la parole
Un corps traversant le mala de l’instant présent
Sans lumière, pas d’ombre, comment aller au-delà ?
Le maître demande :
« Qu’est-ce que cela ? »
« Cela c’est quoi ? »
L’empereur demande :
« Qui est devant moi ? »
« Non-savoir »
Non-savoir, est la seule réponse acceptable
« Je » ne sais pas, et pénétrer « non-savoir » est véritable connaissance
Trente coups de bâton, « je » retourne au néant
Trente coups de bâton, « je » naît sur terre
Il devient possible de voir dans le miroir sans reflet
Un être debout, la compassion et la sagesse sont le cœur de la voie du Bouddha, de la vie.
Voici un extrait de l’enseignement de Mazu Daoyi ou Ma-tsou (709-788):
« Tous les êtres, depuis un nombre incommensurable de kalpa, ne sont jamais sortis du samâdhi de l’essence de la doctrine (dharmatâ). Tout en résidant en permanence dans ce samâdhi, ils mangent, se vêtissent, discutent, répondent. En définitive, le fonctionnement des organes des sens et tous les actes sont l’essence de la doctrine. Ceux qui ne savent pas retourner à la source s’attachent aux noms, poursuivent les phénomènes, de sorte que s’élèvent passions erronées et pensées fausses, et ils cultivent toutes sortes de karma. Mais pour qui est capable en une seule pensée de retourner à la source, son être entier devient le Cœur saint.
Que chacun d’entre vous parvienne à son propre Cœur, ne vous attachez pas à mes paroles. Même si j’étais éloquent et parlais de sujets aussi innombrables que les grains de sable du Gange, le Cœur n’augmenterait pas ; même si aucun discours n’étais prononcé, le Cœur ne diminuerait pas. Ce qui parle d’obtention, c’est votre Cœur, ce qui parle de non-obtention, c’est aussi votre Cœur. De même si vous multipliez votre corps, émettez de la lumière, faites des dix-huit miracles, cela ne vaut pas de faire retourner le moi à la cendre éteinte. »
(source : Les entretiens de Mazu, maître chan du VIIIe siècle, trad. Catherine Despeux. Editions Les deux océans, 1980)
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